Marianne Perez
Omer Labbé est né en 1924, fils d’Arthur Labbé et d’Alice Bilodeau. Il a passé toute sa vie à Saint François. À 89 ans, il travaillait encore à sa menuiserie ! Un vaillant, un courageux qui suscite encore aujourd’hui l’admiration. Il est décédé en 2016 à l’âge de 92 ans.
La mairesse de Saint-François, Lina Labbé me confie : « La dernière fois que je suis venue, Omer était assis là dans son fauteuil. Je le vois encore. »
Jacques Pelletier parle avec émotion : « J’ai travaillé chez Omer dans les années 1980 et j’ai bien aimé. Il a vécu avec Mme Couture, une très gentille dame. Elle avait trois fils : Jacques, médecin, Jean, comptable et François. Elle avait une propriété à Saint-Laurent et une autre à Québec. Son mari était entrepreneur et il était décédé depuis de nombreuses années. Ils restaient sur la rue Joffre. J’ai un peu travaillé pour eux aussi. Il avait aussi son neveu, à l’île. »
Au téléphone, Jacques Pelletier confie sa grande admiration et sa peine d’avoir perdu un grand ami : « C’était un solitaire, Omer. Une anecdote… (il rit) : « Un jour, les sœurs sont venues chercher des fenêtres et elles ne voulaient pas payer. Omer a brisé toutes les fenêtres. C’était un sacré personnage (rires). »
« Il avait son bureau dans la petite pièce en entrant, à gauche, dans sa maison. Il mettait toujours ses liasses de billets dans sa poche et le soir il les vidait dans son tiroir. Tout le monde le savait à l’île, alors un jour il s’est fait voler, le pauvre. Ce jour-là, il a perdu une sacrée somme d’argent. Je ne saurais pas dire combien, mais y en avait du travail dans ce tiroir. J’habitais à l’île, à Sainte-Pétronille, et j’allais travailler avec Omer.
« Avant, je rénovais de vieilles bâtisses. On se voyait souvent avec Omer et puis, un jour, comme je l’aidais souvent, il m’a dit vient travailler avec moi. Alors j’ai travaillé avec lui. On a passé de beaux moments avec mon ami. Dans sa maison, assis dans la cuisine, à la table, à discuter de tout. On avait les mêmes goûts et la même passion de travailler avec nos mains. Ça, c’était beau. Il a travaillé fort, Omer. Il disait toujours qu’il avait commencé à 9 ans, avec son père, dans le coin de l’atelier. Il a même perdu trois doigts dans le corroyeur. Ce n’était pas tous les jours facile. Mais il aimait ça travailler le bois. Après ça, dans les années 1980, j’ai vendu la maison et on est allé vivre à Québec. Il me manque, mon ami. Ce sont des bons souvenirs. »
M. Omer, un homme de caractère, amoureux de la gent féminine, toujours respectueux, un grand passionné des arbres, de la forêt, un solitaire joyeux qui aimait rire. Il transformait ses planches à merveille avec toujours le même amour de son métier. Il espérait vivre 100 ans, adoptait tous les chats du voisinage et élevait des oies derrière l’atelier… On sent l’âme de cette île, une union entre ses habitants ; M. Omer vit encore à travers ses œuvres, car, comme le disait si bien l’article de La terre de chez nous, Omer, c’est « l’homme qui a habillé l’île d’Orléans ».
Dans cet article M. Labbé semble se questionner : « Qui va reprendre l’entreprise ? »
En 2018, François Martel, qui a bien connu M. Omer, rachète l’entreprise et la maison et demande de l’aide à son ami Guy Blouin, enfant de l’île, pour faire vivre cette entreprise de plus de 100 ans à la manière de M. Omer et de son père. Quand on entre dans la menuiserie on pourrait presque l’apercevoir : les moulures et les bois tournés encore suspendus, le petit bureau à l’entrée de l’atelier, l’établi… tout est resté intact.
Aujourd’hui, c’est une équipe dynamique et forte d’expérience qui vous accueille dans l’atelier. Portes et fenêtres ancestrales, moulures et autres créations sur mesure … Le façonnage du bois, une passion commune qui les anime. C’est avec la même humilité et le même amour du travail que M. Omer Labbé que toute l’équipe crée des ouvrages uniques dans la menuiserie patrimoniale pour satisfaire les demandes et les besoins de ses clients. Une belle histoire qui continue à vivre après plus de 100 ans !
Vignette : Omer Labbé a travaillé jusqu’à 89 ans. ©LudvigGermainAuclair2014
