Avec passion, de la tradition à l’innovation

Qui l’aurait cru ? Après plus de 400 ans d’apprentissage et de travail acharné par les résidents de l’île, les relèves entrepreneuriales continuent de faire vivre la tradition. Ce lieu enchanteur et gorgé de ressources n’est pas un mirage ; il est bien réel et constitue un véritable havre de prospérité.

Au fil des ans, l’enjeu de la relève agricole et des commerces locaux a pris de l’ampleur, soulevant une inquiétude croissante chez les consommateurs et les producteurs. Après avoir fait la rencontre de 15 commerces locaux ayant identifié leur successeur et consulté le plan de développement de la zone agricole de la MRC de L’Île-d’Orléans, voici un état de la situation.

En 2021, 100 % des exploitations agricoles ayant prévu de vendre avaient identifié leur relève. Cela représente une nette amélioration lorsque comparé aux données de 2010 où seulement 75 % des fermes en vente avaient désigné leur prochain propriétaire.

Une baisse significative du nombre d’exploitations agricoles désirant vendre leur ferme a également été observée : en 2010, 20 exploitations envisageaient la vente, comparativement à 13, dix ans plus tard. Ce bilan de la MRC indique un regain d’intérêt pour la relève chez les jeunes.

Bien que certains aient toujours envisagé de succéder à leurs parents dans la gestion de l’entreprise familiale, chaque parcours se révèle unique. La nouvelle propriétaire du Potager France Marcoux, Laurie Bégin, a évoqué la continuité familiale comme une évidence : « C’est naturel pour moi de continuer la lignée et de succéder à mes parents. C’est dans la même ligne de pensée que le propriétaire de la Ferme Denis Thivierge Maraîcher de Saint-Laurent, Martin Thivierge, a confié qu’il était « tombé dedans plus jeune » et qu’il voulait, à son tour, léguer les terres à ses enfants. La future relève de la Ferme Orléans, Benjamin Poissenot, a plutôt voulu retourner à ses origines après s’être occupée d’un restaurant en Australie.

D’autres se sont toujours perçus comme des entrepreneurs : tel est le cas de Catherine Monna. Certains, comme la copropriétaire de la Ferme Jean-Pierre Plante, Judith Lessard, découvrent une passion cachée en se chargeant de l’administration de la ferme lors d’un congé de maternité. Aussi invraisemblables que certaines histoires puissent paraître, elles constituent les fondations de ce qui a permis la perpétuité des commerces au fil du temps.

Un lot de défis

Prendre la relève ne vient cependant pas sans défis. Les différences de vision et la difficulté à lâcher prise sont des facteurs à ne pas sous-estimer lors de la transmission d’une entreprise.

« Avoir nos parents à proximité peut être à la fois une aide et un handicap ; il faut trouver le juste équilibre entre prendre sa place et évoluer ensemble », a sagement expliqué la copropriétaire du Moulin Saint-Laurent, Anne Lachance.

Avec ces entreprises, viennent aussi des charges importantes de travail et comme Anne Monna l’a précisé, il est complexe d’être des chefs d’orchestre et d’exceller dans de multiples domaines simultanément. Le propriétaire de la ferme Le Bunker, Patrick Plante, partage cette vision : « La portion terrain est facile à gérer ; c’est plutôt le volet moins concret de la fiscalité et de l’administration autour de la succession de la ferme qui est complexe. » Laurie Bégin a également affirmé que l’acquisition et le transfert de la ferme sont à la fois coûteux et compliqués, une situation que le propriétaire de la Ferme Laval Gagnon, Pierre-François Gagnon, a confirmé en évoquant les nombreux intervenants impliqués dans cette transition.

La conciliation famille-travail et l’investissement d’heures sans compter constituent des implications à ne pas écarter, a mentionné la relève du vignoble Le Mitan, Marie-Christine Turcotte. De leur côté, les copropriétaires des Fromages de l’Isle d’Orléans, Marie-Ève et Noémie Labbé, ont insisté sur l’importance d’une bonne communication afin de garder un environnement de travail harmonieux.

Malgré ces défis, les aspects positifs ont un impact significatif surpassant largement le volet plus difficile de la transaction. L’aspect familial de la passation du flambeau entre les générations a été mis de l’avant par les entrepreneurs : « Je suis fier d’être agriculteur de la ferme familiale », a mentionné le copropriétaire de Verger Viateur Turcotte et Fils, Marc-Antoine Turcotte. « Qu’y a-t-il de plus riche que de laisser des terres en santé à nos enfants », a mentionné Judith Lessard. « Travailler en famille permet d’avancer avec des gens qui ont la même mentalité de travail que nous », a souligné Gabrielle Denault, copropriétaire du Vignoble Sainte-Pétronille avec ses deux frères, Charles et Philippe Denault.

Fort sentiment d’appartenance

Un autre bénéfice majeur qui s’est révélé lors des rencontres a été la possibilité de travailler à son propre compte : « Le sentiment d’appartenance va au-delà des autres emplois, comparativement, quand on s’implique dans l’entreprise familiale », a mentionné Marie-Christine Turcotte. « Il est très valorisant d’assurer la continuité d’une histoire familiale par l’entremise d’une entreprise que nous avons vu croître », a expliqué le copropriétaire de Cidrerie Verger Bilodeau, Claude Bilodeau.

Plusieurs nouveaux propriétaires, comme Pierre-François Gagnon, de la Ferme Laval Gagnon, et Marlène Roberge, du Resto du Sud, soulignent qu’ils s’estiment chanceux que leurs parents aient bâti une si bonne clientèle grâce à leur bonne réputation. « Nos parents nous ont laissé un beau terrain de jeu qui continue de grandir au fil du temps », ont ajouté les sœurs Monna.

C’est avec d’innombrables nouveautés que la relève prend part aux décisions qui assurent des tournants nouveaux à leurs commerces familiaux. Gabrielle Denault est arrivée avec son dynamisme et a mentionné que chacun ajoute son grain de sel. Qui dit nouvelle génération dit remise à niveau au goût du jour a indiqué Claude Bilodeau. Cela implique nécessairement l’aspect informatique des commerces, mais également l’intégration de machineries plus avancées. L’une après l’autre, les idées de ces nouveaux entrepreneurs sont intégrées aux commerces : Marie-Christine a refait l’image du Vignoble du Mitan, Kathleen Hébert, des Serres Roch Hébert, a créé une serre de légumes et augmenté la quantité de transformations. Les sœurs Marlène et Caroline Roberge ont développé de nouveaux points de vente pour le Resto du Sud. Benjamin Poissenot met à profit ses talents de marketing et de gestion du personnel à la Ferme Orléans.

« D’un autre côté, chaque génération apporte ses propres changements et c’est à notre tour d’y contribuer », a souligné Marc-Antoine Turcotte. Néanmoins, il est vital de ne pas oublier qu’aujourd’hui il y a beaucoup de nouvelles innovations, mais que la perduration du commerce et de certaines habitudes dans le temps est aussi importante, selon la mère des propriétaires du Moulin Saint-Laurent, Élise Prémont. Noémie Labbé a appuyé cette idée en mentionnant que si ses parents n’avaient pas été là, elle ne le serait pas non plus et n’aurait pas la chance d’assurer la succession de leur commerce familial.

Somme toute, c’est avec passion que la nouvelle génération prend les choses en main tout en s’inspirant de leurs prédécesseurs qui leur passent le flambeau. Toutes les rencontres ayant eu lieu pour cet article témoignent de cette volonté d’assurer la continuité des commerces familiaux à l’île d’Orléans. Comme Noémie Labbé l’a si bien mentionné : « Avec passion, de la tradition à l’innovation. »

Le propriétaire de la Ferme Thivierge Maraîcher, Martin Thivierge, est accompagné de membres de sa famille. ©Ferme Denis Thivierge Maraîcher

Par Mia Roy
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